Sandrine Kao : Emerveillements, Après les Vagues et Comme un Oiseau dans les Nuages

C’est un post instagram de Bookeylae, sur des livres avec de belles couvertures, qui m’a donné envie de lire Comme un oiseau dans les Nuages de Sandrine Kao. Le titre est magnifique – et la couverture me plait aussi. Je me suis aussitôt renseignée auprès de ma bibliothèque, mais il était emprunté : je l’ai réservé. Et au passage, j’ai découvert qu’un autre livre de cette autrice était disponible : Emerveillements ! C’est lui que j’ai pris avec moi, sans savoir à quoi m’attendre.

personne en chemise rose et salopette en jean, avec un parapluie à papillons lisant Emerveillements de Sandrine Kao devant un sapin et un sol couvert d'aiguilles de pin
Emerveillements

Ça a été un tel coup de cœur que je n’ai pas vraiment trouvé les mots pour en parler : mon avis Goodreads s’est résumé à « C’était génial, je vais l’acheter tout de suite pour l’offrir ! » ça a été une lecture intense et je n’avais pas forcément l’énergie de me plonger dans le pourquoi du comment de mon ressenti.

Emerveillements est une bande-dessinée courte, avec des pages titrées individuellement, mais formant une histoire globale. Chaque page est un commentaire illustré par la vie d’un petit personnage animal. On a généralement quelques phrases qui présentent une situation et un problème, puis une résolution.

Ce format aurait pu me rebuter – j’ai tendance à ne pas aimer les messages superficiels ou les leçons directes − mais au contraire, pour la plupart, j’ai trouvé les pages percutantes. C’était incroyable comme une situation présentée si brièvement pouvait me donner plusieurs pistes de réflexion ! Car bien sûr, on peut prendre le récit au pied de la lettre, ou bien creuser, et creuser encore… Des enjeux de santé mentale, le fait de sortir des normes, sont intégrés au quotidien du personnage de manière fluide. Ce n’est pas un sujet scénaristique continu, ce sont plutôt… des anecdotes. Un jour le personnage va ressentir la pression à fonder une famille, puis ça passe. Un autre le personnage lutte contre ses idées noires, puis ça passe. Ou ça revient. C’est la vie…

Ça donne quelque chose comme :

« De toutes parts, tout pousse et se multiplie. Devant soi, rien. On se sent nul, ridicule. Les autres nous toisent, l’air de dire qu’on est moins bien qu’eux.

Sans doute… Peut-être… Et si… ?

Il suffit de si peu pour perdre confiance…

Il suffit de si peu pour rebondir. »

On peut prendre cette double page au pied de la lettre, avec les illustrations du personnage qui essaie de faire pousser une plante. Mais on le voit aussi contempler son entourage qui a des enfants. Personnellement, j’ai connecté à ce passage en tant que personne aro, qui voit mes collègues et mon entourage construire sa vie autour du couple et des enfants. Ça peut être un tout petit détail qui me rappelle ce genre d’injonction et qui me déprime.

Je me doute que Sandrine Kao n’a pas écrit son texte pour cette situation précise, mais je pense que le but est qu’on puisse interpréter les pages de diverses manières. D’autres lecteurices auront d’autres lectures personnelles.

double page d'Emerveillements, où le personnage somnole au milieu des tournesols
Recherche-t-on la lumière ou préfère-t-on rester dans l’ombre ? / Quand il y a de l’ombre, le soleil brille dans le ciel.

J’ai aussi beaucoup pensé à une personne qui m’est chère en lisant Emerveillements, si bien que j’ai voulu lui offrir cette bande-dessinée dès que je l’ai terminée. J’avoue qu’une fois que je l’ai achetée, je me suis rendu compte que ce n’était pas ma meilleure idée. J’ai associé la personne et la bande-dessinée alors un cadeau m’a paru logique sans que je réfléchisse à la question « est-ce que ça lui plairait ? »

J’ai donc pas mal cogité sur « pourquoi cette BD m’a fait penser à lui ? » et « est-ce que c’est une bonne ou une mauvaise chose, est-ce que ça le flatterait, est-ce que ça le vexerait ? » J’aime me reconnaitre dans mes lectures, mais ce serait perturbant que quelqu’un me donne un livre en me disant qu’il l’a fait penser à moi.

Je pense que mon association vient du fait que c’est une histoire douce, quotidienne, mais avec des réflexions profondes, des joies simples et sincères, des émotions compliquées. Et le personnage me fait penser à ce que pourrait dessiner cette personne…

personne en gilet bleu lisant Comme un Oiseau dans les Nuages de Sandrine Kao appuyée contre un pont en bois
Comme un Oiseau dans les Nuages

Après avoir adoré Emerveillements, j’avais hâte de découvrir Comme un Oiseau dans les Nuages, un roman cette fois-ci, et j’ai commencé sa lecture dès que ma réservation est arrivée.

C’est marrant : le jour d’avant, j’avais discuté avec un·e ami·e du fait que je n’avais jamais lu de roman évoquant le covid. J’avais lu une fanfiction où, au cours d’une enquête, la pandémie commence et entrave les rencontres avec les témoins, ainsi qu’une autre qui évoquait le racisme anti-asiatiques lié à la pandémie en Allemagne ; et dans la série Everything is gonna be Okay, les personnages se retrouvent confinés durant quelques épisodes, mais c’était tout.

Comme un Oiseau dans les Nuages se déroule aux débuts de l’épidémie en France, et bien que ça ne joue pas de rôle dans l’intrigue, ça impactait le quotidien des personnages – comme le nôtre – et ça m’a fait très bizarre.

Le roman s’ouvre sur la sortie d’hôpital d’Anna-Mei. Une thérapeute lui conseille de renouer avec l’histoire des femmes de sa famille, et commence alors un dialogue avec sa grand-mère où Anna-Mei se confie sur les derniers bouleversements de sa vie, tandis que sa grand-mère lui raconte le récit de ses ancêtres. On alterne entre les chapitres « Anna-Mei » et « Ama » – sa grand-mère – , chaque chapitre étant le point de vue de l’une s’adressant à l’autre, et donc rédigé en « tu ».

« A ma sortie de l’hôpital, je ne désirais pas plus ta compagnie. Tu étais là pour moi, mais je n’arrivais pas à t’en être reconnaissante, à être patiente. J’étais encore trop mal, trop rongée par l’angoisse de n’être plus jamais celle que j’étais avant la crise. »

Je trouve cette narration originale, et parfois ça rendait vraiment bien, mais à d’autres ça me mettait à distance des personnages, car les dialogues sont plus indirects. Et je me rendais compte que jamais quelqu’un ne parlerait comme ça !

Je n’ai pas beaucoup connecté avec les récits des ancêtres d’Anna-Mei, qui étaient, quelque part, trop résumés, et racontés par une tierce personne. Difficile de ressentir les émotions d’un personnage quand une autre personne retransmet les grandes lignes de sa vie !

J’avais beaucoup aimé la manière dont Emerveillements traitait de santé mentale, mais j’avoue qu’ici, j’ai été moins convaincue. Peut-être parce que je n’ai pas compris l’aspect mystique ? Et je trouve qu’on passe un peu trop vite sur sa relation avec son copain, notamment sur le consentement assez douteux. Beaucoup d’aspects de ce récit auraient pu être creusés davantage !

Comme un Oiseau dans les Nuages était une lecture originale et sympathique, mais dans laquelle je ne suis pas vraiment entrée… Quand j’ai enregistré ce roman sur Goodreads, j’ai toutefois remarqué une récente publication de Sandrine Kao : Après les Vagues, la suite d’Emerveillements ! Je me suis empressée de l’acheter.

personne en pantalon en velours cotelé et t-shirt avec un bateau pirate lisant Après les Vagues de Sandrine Kao devant une baignoire remplie de plantes
Après les Vagues

Emerveillements était une histoire qui ne nécessitait pas de suite et il est tout à fait possible de lire Après les Vagues indépendamment. On retrouve deux des personnages après leur voyage sur une nouvelle île, et on suit leurs explorations et leurs rencontres. De ce synopsis, vous pouvez deviner qu’il y avait plus de scénario que dans le tome précédent, difficilement résumable tant c’était une suite d’anecdotes.

C’est peut-être parce que je m’attendais au format et au contenu que j’ai été moins émerveillée par Après les Vagues. Ou alors, j’ai moins connecté avec les situations… il y en a quelques-unes qui m’ont parlé, mais dans l’ensemble, je suis restée à distance des doubles lectures, qui faisaient plus « leçon » que déclencheur à introspection. Ça a été une lecture agréable, mais plus terre-à-terre et moins bouleversante qu’Emerveillements.

couvertures des trois livres de Sandrine Kao présentés dans cet article

Ces trois œuvres pour la jeunesse parlent de santé mentale de manière originale et différente : Comme un Oiseau dans les Nuages car c’est lié à des aspects générationnels et mystiques, et Emerveillements car c’est intégré au quotidien sans être dramatisé. C’est vraiment chouette d’avoir des approches différentes de la santé mentale, et dans le cas d’Emerveillements, j’ai vraiment connecté à ce portrait !

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *