Je ne sais plus comment j’étais tombée sur la bande-annonce du film Love, Simon, mais je me souviens que je n’avais pas envie de le voir – je regarde peu de films, et surtout de la SF − tout en étant assez intéressée pour lire l’intégralité du résumé – fin comprise – sur Wikipédia. Du coup, je connaissais l’identité de Blue, maintenue mystérieuse tout au long de l’histoire…
Finalement, par manque de choix, je suis allée le voir au cinéma avec une amie de ma mère. Et j’ai passé un excellent moment !
Je me suis ensuite intéressée au livre, et comme je l’ai relu récemment, c’est l’occasion d’en parler. Le film et le livre ne commencent pas au même moment : alors que le film prend le temps de nous présenter Simon, son quotidien, ses ami·es, la façon dont il découvre qu’il y a un autre mec gay dans son lycée, comment ils commencent à discuter par mail sous des pseudonymes… le livre commence directement lorsque Martin, un de ses camarades de classe, découvre ses mails et commence à le faire chanter. Plutôt que d’assister à la « rencontre » en ligne entre Simon et Blue, on suit leurs échanges alors que Simon commence à tomber amoureux.
J’ai beaucoup aimé leur relation, qu’on découvre au fil des e-mails. Elle est bien approfondie et on connait Blue, même si Simon ne le fréquente pas au quotidien. Les amitiés entre Simon et Abby, ainsi qu’entre Simon et Leah, sont très bien écrites aussi, tout comme ses relations avec sa famille. Il y a aussi régulièrement des petites phrases qui me faisaient arrêter de lire pour réfléchir, comme lorsque Leah explique que c’est pire de se faire insulter par procuration – lorsque quelqu’un se montre homophobe en présence de Simon sans savoir qu’il est gay, par exemple.
Le roman tourne autour du coming out : Blue et Simon font les leurs à des ami·es, à des membres de leur famille, il y a le chantage de Martin, et l’outing de Simon. Ça permet d’aborder différentes facettes du coming out, mais le risque c’est que la « leçon » de l’histoire soit qu’il faut faire son coming-out et qu’on a tort d’en avoir peur. J’ai d’ailleurs vu des analyses de l’œuvre qui vont en ce sens, mais à mes yeux, c’est plus complexe que ça. Le principe même du coming out est remis en question par les personnages à plusieurs reprises, et le cœur du personnage de Simon, la « leçon » qu’il apprend, ne se situe pas sur ce plan-là : son défaut majeur est de ne pas se mettre à la place des autres, de s’arrêter à la surface et de sauter aux conclusions. Il se trompe sur sa petite sœur, sur l’identité de Blue, sur sa meilleure amie. Lorsque je l’ai relu en connaissant la fin et en ayant lu les tomes suivants, c’était presque comique de lire les passages où Simon échange un regard avec Leah et part du principe qu’elle pense comme lui, alors que… pas du tout.
Moi, Simon, 16 ans, Homo Sapiens est un livre doux et j’aime beaucoup l’idée de reprendre l’ambiance des comédies romantiques lycéennes. Même si ce n’est pas une histoire très complexe, elle offre des pistes de réflexion et surtout, les relations amicales, familiales et amoureuses m’ont touchée. Il n’en faut pas beaucoup plus pour me faire aimer un livre !
J’étais ravie de découvrir qu’il y avait d’autres romans dans l’univers de Moi, Simon, 16 ans, Homo Sapiens − la série s’appelle Creekwood −, mais le résumé de ce tome 2 m’a refroidie – l’histoire d’une fille qui passe son temps à tomber amoureuse ne me tentait pas plus que ça. C’est pourquoi j’ai attendu presque un an avant de le lire.
La bonne surprise, c’est que bien que l’héroïne soit hétéro, l’ambiance de Mes Hauts, Mes Bas, Mes coups de Cœur en Série est presque plus LGBTI+ que Moi, Simon, 16 ans, Homo Sapiens : ses mères sont en couple lesbien, sa sœur est lesbienne et la petite amie de celle-ci pansexuelle, et on a des personnages − très secondaires − gays et trans. Avec en fond, la loi sur le mariage gay qui permet, dans le dernier chapitre, de célébrer le mariage des deux mères − ce n’est pas un spoil, promis, c’est annoncé dès le début du roman !
Tout ça contribue à créer une atmosphère de normalisation LGBTI+, sans pour autant nier les luttes qu’on doit mener.
L’histoire se concentre autour de Molly, adolescente grosse qui a de nombreux crush sans jamais avoir agi pour l’un d’entre eux. Au début du roman, elle décide de ne plus attendre et d’agir pour être en couple.
Un point que j’ai trouvé très intéressant, en tant que personne aromantique, est que je me suis reconnue dans la narratrice. Incroyable, non ? Il m’est arrivé d’éprouver ce que je pensais être de l’attirance romantique, mais qui était en réalité un besoin de validation et de dépendance émotionnelle. Les sentiments dans Mes Hauts, Mes Bas, Mes Coups de Cœur en Série ressemblaient beaucoup à ça…
Molly ne se rend compte de son attirance pour Will le « parfait » que lorsque sa sœur le lui fait remarquer − rien dans ses pensées ne distinguait Will avant. Bien sûr, schéma narratif classique, elle va finalement se rendre compte qu’elle n’est pas amoureuse de Will, mais de son ami Reid. Et cette relation se développe beaucoup à travers le regard des autres : « est-ce que les gens vont nous prendre pour un couple ? » ou encore « est-ce qu’il va croire à tort que je m’intéresse à lui ? »
De plus, Molly répète assez souvent qu’elle complexe sur son poids et qu’elle est donc convaincue que personne ne peut l’aimer. Elle a besoin d’un amoureux pour s’aimer elle-même.
En parallèle, sa sœur se met en couple et Molly souffre parce que sa sœur passe moins de temps avec elle, ne se confie plus à elle, et elle se retrouve… seule. Tout autant que le célibat, la perspective de devenir adulte, de voir ses amies fonder des familles et l’abandonner la terrorise. Elle a besoin d’un petit ami, sans quoi elle sera vraiment isolée. C’est une crainte que j’ai souvent éprouvée, et qu’on me ressort assez souvent, je l’ai trouvée très bien traitée ici.
Ce roman m’a fait beaucoup réfléchir sur la romance, et c’est voulu. Il y a notamment un passage où Molly se demande si elle peut être à la fois féministe et avoir désespérément envie d’être en couple, et elle dit aussi qu’elle a l’impression qu’elle désire être en couple parce qu’elle a l’habitude d’en avoir envie. Elle ne donne pas de réponse absolue à ces questions, ce qui permet aux lecteurices de s’interroger aussi…
Je ne sais pas être objective sur ce roman, puisque j’ai passé ma lecture à le décortiquer, et que j’ai beaucoup aimé ça ! Je ne l’aime ni pour son histoire, ni pour ses personnages, même si c’est divertissant. Ce sont toutes les réflexions qu’il a éveillées qui m’ont passionnée.
Après avoir apprécié tous les autres romans de Becky Albertalli, je la considérais comme une valeur sûre et j’avais prévu d’acheter Leah à Contretemps.
Mais mon frère était en retard pour notre rencontre, alors au lieu d’acheter le livre et de le lire dehors dans le froid, j’ai attaqué le premier chapitre dans la chaleur un peu étouffante du magasin.
On retrouve le personnage de Leah, l’amie d’enfance de Simon, qui nous raconte cette histoire. Elle est bi, sa mère le sait, affaire classée. Elle ne songe pas à faire de coming-out et ce n’est pas central dans sa vie.
C’est peut-être stupide, mais la première chose qui a retenu mon attention c’est la mise en page des « t ». Sérieusement. Dans la première page, il y en avait plusieurs qui étaient déliés, et ça perturbait vraiment ma lecture, au point que je me suis dit « non mais c’est pas possible, je vais pas pouvoir lire tout un roman comme ça ! ». J’ai donc ouvert le livre au milieu – en croisant les doigts pour ne pas trop me spoiler – et je n’ai pas vu de t déliés.
Je me suis donc dit qu’il y avait une règle à la présence des t : peut-être était-ce pour le premier chapitre, seulement. Je suis retournée au début pour mener mon enquête.
On en découvre un peu plus sur la vie de Leah, notamment sur sa relation avec Abby : elle était attirée par elle, mais cette dernière s’est mise en couple avec Nick. Leah est un personnage très furieux, ce qui était parfois déconcertant.
Il y avait aussi des t déliés dans le deuxième chapitre. Mais ils côtoyaient des t classiques… Je me suis demandé s’ils étaient réservés aux textos, par exemple. Non. Aux dialogues ? Non plus. Je suis retournée dans le premier chapitre, il y avait aussi des t classiques…
J’avoue à ma grande honte que j’ai dû classer cette affaire. Je n’ai pas trouvé d’explication, et mon frère est arrivé. Par la suite, l’histoire m’a captivée, et j’en ai oublié ces t qui me sortaient de temps à autre du récit – quoi qu’ils se fassent de plus en plus rares.
Un an après, c’est difficile de me souvenir des détails de l’intrigue : on suit la vie d’une lycéenne, ses accrochages avec ses ami·es, sa passion pour le dessin qu’elle n’ose pas explorer professionnellement, son attirance pour Abby… Ma scène préférée est celle de leur premier baiser, très maladroit : même si c’est Leah qui raconte l’histoire, je savais parfaitement ce que ressentait Abby, qui se dit hétéro mais qui est attirée par Leah et ne sait pas trop quoi faire. C’est un passage très sincère, où on les comprend toutes les deux.
D’une certaine manière, j’ai trouvé la fin trop ellipsée : on n’assiste pas à la résolution de quelques-uns des conflits du roman, on sait juste qu’ils sont résolus. Mais d’un autre côté, j’ai bien aimé cette ellipse, qui laisse à l’imagination du lecteur le soin de compléter, et qui souligne que finalement, le problème n’était pas si important – sinon l’autrice nous aurait donné la solution.
C’est ainsi que s’achève pour moi cette trilogie touchante et humaine, dont chaque tome est différent, mais dans le même esprit de sympathie, de solidarité. Et avec quelques phrases par-ci par-là qui me précipitaient dans des réflexions intéressantes !
Avertissement : remarques homophobes et grossophobes, chantage
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