Je ne sais pas toujours quoi faire de mes articles courts, mais là, c’est parfait : Le vrai sexe de la vraie vie et Corps à Cœur Cœur à Corps, deux bandes-dessinées rassemblant des témoignages sur le corps, toutes deux éditées par les éditions lapin !
Les deux tomes de Le vrai sexe de la vraie vie de Cy m’ont été prêtés par un* ami*, et j’avoue que j’avais des doutes : à la fois je trouvais que discuter d’activité sexuelle était passionnant, à la fois ça me mettait mal à l’aise, mais après coup − parce que, emportée par mon envie de comprendre, je pouvais dire des choses puis me demander si je n’aurais pas mieux fait de me taire.
Au-delà, penser au sexe en privé était aussi une activité assez ambigüe à mes yeux, car j’en retirais souvent une grande perplexité.
Mais on me l’avait bien vendue, en m’expliquant qu’il s’agissait de témoignages et en me montrant le chapitre sur l’asexualité dans le tome 2 – oui, mes ami·es savent très bien comment m’appâter. De plus, il faut quand même dire que la couverture est magnifique. J’adore ce style de dessin − que je surnomme crayonné aquarellique dans ma tête, désolée pour mon ignorance.
J’ai donc commencé à lire et… j’ai tout dévoré d’une traite. Déjà, parce que c’est fluide, ça se lit facilement en termes de texte et de dessins. Le vrai sexe de la vraie vie présente des scènes de la vie sexuelle de personnes variées, c’est divertissant, c’est sincère, on s’y croit, et surtout, il n’y a jamais de gêne. Même si les personnes sont parfois embarrasseés, cet embarras ne se transmet pas aux lecteurices ! Franchement, quand je repense à cette BD, je ne l’associe pas du tout à une œuvre érotique/scandaleuse/racoleuse/osée/[insérer ici adjectif qualifiant généralement une œuvre traitant de sexe] et pas non plus documentaire ou éducative − même si elle l’est. Je pense à cette BD comme une œuvre mignonne, fun, adorable. Un petit bout de chou !
Un autre aspect de cette bande-dessinée, qui va au-delà de son côté humoristique et éducatif, c’est que, d’une certaine manière, elle fait rêver. Alors je n’ai pas plus envie qu’avant d’avoir des relations sexuelles, mais, bien plus que toutes les autres œuvres que j’avais consommées avant, elle représentait l’activité sexuelle comme quelque chose de positif, fun, agréable. Au lieu de présenter ça comme torride, grandiose, comme une explosion de sensation et d’amooouur. Et pour moi ça fonctionne beaucoup mieux comme ça !
Bref, j’ai passé un bon moment − en plus d’apprendre un truc ou deux, car Cy ne s’en tient pas aux bases du consentement et de la protection, mais aborde des aspects moins connus de l’activité sexuelle.
Durant mon week-end sans internet, j’ai lu Corps à Cœur Cœur à Corps, un rassemblement de témoignages, illustrés par Léa Castor, sur le thème du corps et des complexes. Il est aussi disponible en ligne ! Avant de le commencer, je ne savais pas trop quoi en penser. Le thème des complexes m’intéressait peu parce que j’avais aussi l’impression qu’il allait mettre au même niveau les injonctions à la beauté, le sexisme et les autres oppressions. Je ne veux pas faire un concours des oppressions, mais je pense quand même que mettre au même niveau un complexe lié à des oreilles décollées et un complexe lié à des cheveux crépus, par exemple, n’est pas une excellente idée.
Je ne l’aurais donc pas lu s’il n’avait pas été sur un présentoir de ma bibliothèque.
On vit dans une société qui juge et catégorise sans cesse nos corps. Forcément, on en ressort abîmé·es, et il est ensuite dur d’apprendre à s’aimer. Léa Castor a demandé à des personnes de lui envoyer des photos des parties de leur corps qui les complexaient. Elle les a ensuite dessinées, et a noté leur réaction en leur montrant le dessin. Le livre rassemble les dessins, la retranscription des réactions, et un petit témoignage illustré pour chaque personne.
C’était finalement plutôt intéressant à lire : on découvre des expériences de vie différentes, on se reconnait dans certaines. Bien sûr, j’ai apprécié la présence d’un·e témoignant·e asexuel·le ! Il y a des vécus très durs qui sont partagés, et les dessins renforcent cette dureté. Et en même temps, ils montrent les personnes toujours sous un angle flatteur, c’est très agréable.
J’ai lu ce recueil d’une traite, en cuisinant, et ce qui m’a finalement le plus frappée, c’est à quel point la romance jouait un rôle dans le processus d’amour de soi. Dans la moitié – au moins ! – des témoignages, la personne ne finit par s’aimer que parce que saon partenaire apprécie la partie du corps qui la complexe.
D’un côté, c’est merveilleux que la romance puisse avoir ce rôle, puisse permettre à des gens d’accepter leur corps et de l’aimer. D’un autre… comment on fait, si on ne trouve pas LA personne qui aime notre corps à notre place ? Et certains témoignages montraient aussi comment les mots d’un·e partenaire pouvaient créer le complexe…
Corps à Cœur Cœur à Corps ne m’a pas particulièrement emballée en soi, mais j’apprécie l’effort et ça m’a donné des idées. Quand on parle de différence, on en parle souvent pour le regard des personnes dans la norme. Ce livre parlait du regard sur soi-même, et ça m’a donné envie de monter un projet parlant de notre regard sur les personnes dans la norme. Inverser l’angle ! Je vais voir quelle forme je donnerai à cette idée…
Avertissement Le vrai sexe de la vraie vie : scènes de sexe, règles, rapports non protégés
Avertissements Corps à Cœur : scarification, abus incestueux, TCA, TOI, génitaux, harcèlement, racisme, hirsutisme vu comme une maladie
Une réflexion sur « Bandes-Dessinées de Témoignages sur le Corps »