The Ultimatum : Queer Love

Tous les personnages de The Ultimatum : Queer Love

Je l’ai dit dans mon retour sur Avant Minuit : la phrase « on devrait réaliser une téléréalité romantique gay, parce que les queers aussi ont le droit de voir leurs mauvaises décisions diffusées mondialement » a beaucoup résonné avec moi. Il y a une grosse pression pour toujours montrer le meilleur de notre communauté… la véritable égalité, c’est le droit à l’erreur, le droit à être de mauvaises personnes sans que ça retombe sur notre queerness. Quand j’ai donc vu que la téléréalité The Ultimatum sur Netflix diffusait une version queer, j’étais tout de suite emballée. Je n’avais jamais regardé de téléréalité avant, mais quand c’est queer, ça m’intéresse !

Le concept est affreux : cinq couples sont invités, avec l’une 1 des partenaires qui a donné un ultimatum « épouse-moi maintenant, sinon on se quitte » et l’autre qui l’a reçu et n’est pas prête à se marier. Les couples se séparent au début de l’émission, passent une semaine à rencontrer les autres participantes, et ensuite, en choisissent une à épouser pendant trois semaines. Elles vivront ensemble comme si elles étaient mariées, puis les couples initiaux se reforment et passent trois semaines ensemble. A la fin, il faudra prendre une décision : repartir fiancée à sa partenaire initiale, repartir fiancée à une autre personne, ou repartir célibataire. Tout ça nous sera montré en dix épisodes d’une heure…

Ce scénario m’a immédiatement crispée – mais quel genre de gens participe à ça ? – mais au fur et à mesure que les couples présentaient leur situation, j’étais intriguée. Son rêve d’avoir des enfants est le plus important aux yeux de Xander : les procédures PMA étant longues, si sa partenaire de cinq ans n’est pas sur la même longueur d’ondes, il faut qu’iel commence à chercher quelqu’un d’autre pour l’accompagner dans ce projet. Difficultés financières, communication catastrophique, trauma : chaque situation était unique et complexe, et c’était passionnant de voir ces personnes se rencontrer. Il se trouve que si j’ai du mal avec les gens dans la vraie vie, je trouve les relations et la psychologie super fascinantes, alors cette expérience sociale me plaisait beaucoup !

Et puis bien sûr, comme j’aime écrire des histoires, voir comme le montage s’y prenait pour nous orienter était passionnant. Pour chaque couple, on ne voit que quelques extraits des trois semaines passées ensemble : qu’est-ce que la série choisit de nous montrer ? Est-ce que des scènes qui expliqueraient une crise de colère sont volontairement coupées pour nous donner l’impression que ça sort de nulle part ? Est-ce un hasard si la même personne a une « musique de méchante » en fond quand elle pleure, alors que d’autres ont une mélodie tragique ?

Honnêtement, je pourrais disserter longtemps sur chaque épisode – d’ailleurs, j’en ai beaucoup parlé à trois de mes ami·es, et l’un·e d’elleux s’est mis·e à regarder aussi, c’était cool d’échanger. J’ai forcément plus ou moins d’affinités avec les personnes présentes, mais j’ai essayé de prendre en compte le fait qu’on ne me montrait qu’une vision biaisée et raccourcie de la situation.

C’était vraiment divertissant, car à la fois super intéressant, avec plein d’émotions et d’intensité, et en même temps… je n’ai pas grand-chose en commun avec elles. Pas seulement parce que jamais je ne participerais à une telle émission : je crois que, forcée dans une telle situation, je ne réagirais pas comme ça, et les personnes que j’aime non plus. Il y a des avantages à être aromantique, polyA et ace…

Quoique, l’intensité de l’expérience n’est pas uniquement due au romantisme : vu les réactions, je crois que les versions hétéros étaient différentes. Déjà parce que j’imagine que chaque personne n’avait que quatre partenaires potentiels, alors que là, c’est neuf ! Mais aussi parce que parfois, les clichés sont vrais : les lesbiennes peuvent se dire « je t’aime » au bout d’une semaine. Oui, les « U-haul lesbians » sont un stéréotype, mais il y a vraiment des personnes comme ça, et l’organisatrice hétéro semblait totalement dépassée. C’était hilarant… J’ai aussi adoré voir la réaction de Trixie et Katya aux 9 premiers épisodes !

Mais sur la fin, j’avoue que le romantisme m’a pesé. Quand quelqu’un dit « oui, on a partagé trois ans ensemble, je t’aime plus que tout, j’ai confiance en toi, je me vois construire une vie à tes côtés… mais il n’y a pas d’étincelles romantiques, alors je préfère tenter ma chance avec cette personne que je connais depuis trois semaines », c’est très dur à entendre. C’est si important, l’étincelle romantique ? Plus important que d’être avec une personne de confiance qui nous a soutenu dans nos pires moments ?

Le tout dernier épisode est absolument génial. Il change pas mal des autres, mais quelle excellente idée scénaristique : il nous donne du recul et de la perspective. Moi qui d’ordinaire n’aime pas les épilogues, cette fois-ci, c’était parfait.

Cerise sur le gâteau : la toute dernière seconde, qui parachève cette œuvre en beauté : l’information apportée est en contradiction totale avec ce que les personnes concernées ont affirmé tout au long de l’épisode.

Regarder The Ultimatum : Queer Love a été une expérience incroyable. Ça m’a tellement fait réfléchir ! Tous les soirs, je me demandais ce que j’aurais fait à leur place, ce que je souhaitais pour la suite, je questionnais mon opinion des gens. Il n’y a pas de vérité absolue, surtout pour moi qui ne suis pas très douée pour juger de la sincérité des gens. Le public semble affirmer que certaines excuses étaient performatives, et que d’autres étaient sincères : comment on sait ? Elles sont toutes en train de performer devant des caméras ! Pourquoi les problèmes d’égo de l’une seraient plus « maléfiques » que le trauma d’une autre ? Couper la parole tout le temps est horrible, mais on peut aussi comprendre ses insécurités…

Conclusion : les personnes sont complexes, et les relations, c’est compliqué. Personne n’est parfait, deux personnes peuvent avoir tort en même temps, raison en même temps, ou un mélange des deux. Cette affirmation est une évidence, et je le savais déjà, bien sûr, mais… parfois, dans un monde qui juge et condamne vite, c’est bon d’avoir un exemple concret qui nous le rappelle.

Si vous avez le cœur bien accroché, je vous conseille donc vivement de vous plonger dans le chaos dramatique qu’est The Ultimatum : Queer Love.

Radar à Diversité : personnages lesbiennes, pan, non-binaires

Avertissements : relations toxiques, violence domestique

 


1 Je vais utiliser le féminin universel dans cet article, parce que c’est une émission saphique, et que 8 des personnages utilisent (entre autres), le féminin. La majorité l’emporte ?

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