J’avais déjà lu plusieurs livres de Cordelia, alors quand j’ai vu le tome 1 de L’Eveil des Sorcières dans ma bibliothèque, je me suis empressée de l’emprunter.
La trilogie est racontée du point de vue de Nora, une collégienne qui, lorsqu’un garçon de sa classe la tourmente, déclenche accidentellement un tremblement de terre. Elle est alors invitée par sa prof de musique, en réalité une sorcière, à suivre un apprentissage aux côtés de deux autres sorcières de son collège, Maëlys et Rajan.
Nora est très attachante, par l’honnêteté de sa plume et son style dynamique. J’étais de tout cœur avec elle ! Comme souvent, c’est aussi son affection pour les autres qui m’a permis de l’aimer. Chose rare, ses pères sont impliqués. Eh oui, elle n’est ni orpheline, ni obligée de cachée ses pouvoirs à sa famille, au contraire, sa professeure tient à ce qu’elle soit soutenue. Pas très pratique quand ses pères refusent qu’elle se mette en danger, mais ça veut aussi dire qu’elle peut compter sur eux en cas de problème.
J’ai dévoré ce tome en une journée : il est court, entrainant, et particulièrement bien équilibré niveau scénario. Les histoires parallèles s’entremêlent bien, il se passe plein de choses variées sans que ça ne soit jamais confus ou dispersé ! On a d’une part l’apprentissage de Nora, qui découvre la sorcellerie, et d’autre part sa lutte contre le harcèlement sexuel dans son école. Ses co-apprenti·es et elle ont alors envie d’utiliser leurs pouvoirs pour régler le problème, mais… comment déterminer la limite entre justice et vengeance ? Entre utiliser ses pouvoirs pour apporter une solution, ou seulement parce qu’on peut ? Surtout que préserver le secret de la magie est très important, il faut mesurer ses actions.
Comme j’avais beaucoup aimé, j’ai tout de suite acheté la trilogie complète plutôt que de me contenter du tome 1. La suite avait intérêt à être à la hauteur ! Cependant, comme souvent quand j’achète des livres, je donne la priorité à ceux que j’emprunte, et les tomes 2 et 3 sont passés en arrière-plan. Ce n’est que quelques mois plus tard, pour mes vacances d’été, que je les ai emportés avec moi, pour n’avoir pas d’autre choix que de les lire.
Dans Le Secret de Maëlys, on retrouve Nora alors qu’elle poursuit son apprentissage, et s’inquiète pour Maëlys, de moins en moins investie dans les cours de magie. Nora a dû mal à être une bonne amie, que ce soit envers ses camarades de classe auxquelles elle ne peut pas révéler ses talents, ou envers Maëlys qui refuse de lui parler. Elle fait des erreurs, mais a du soutien de la part de ses pères qui l’aident à s’améliorer. Jusqu’à ce que ça tourne au drame pour Maëlys…
J’ai vu les difficultés de Maëlys avec sa magie comme une métaphore de la différence, et à quel point c’est important que l’entourage l’accepte. Ce qui est bien, c’est que de nombreux livres parlant « d’oppression des personnes magiques » ont, par ailleurs, des personnages rentrant parfaitement dans les normes. Je trouve ça toujours un peu irritant, cette représentation qui n’en est pas une. C’est bien de parler d’enjeux sociaux, mais j’apprécie que ça ne soit pas qu’à travers une métaphore… c’était déjà quelque chose que j’avais apprécié dans le tome 1, qui abordait des sujets réels.
Maëlys est malentendante et sort avec une fille, Rajan a la peau sombre, Nora est grosse, a deux pères dont un qui est latino. On ne parle pas directement des difficultés qu’iels subissent en tant que personnes marginalisées – c’est seulement évoqué – ce qui est assez reposant, mais la série parle malgré tout d’oppression, à travers les sorcières. L’équilibre est bien trouvé !
Dans le tome 2, on voit le rôle qu’a la réaction de l’entourage sur le ressenti de Maëlys. Quand nos parents rejettent une partie de nous, quelles sont les conséquences ?
J’ai toutefois, dans l’ensemble, moins aimé ce tome que les autres : je n’ai pas l’impression qu’il se soit passé grand-chose, il ressemble plus à une transition entre les tomes 1 et 3.
Dans Le Rival de Rajan, le cœur de l’intrigue est la réunion au sommet des sorcières francophones, qui doivent décider si elles autoriseront les sorcières qui ne sont pas issues de lignées magiques – comme Nora, Maëlys et Rajan – à pratiquer. On voit les arguments des unes et des autres, la peur et la peine de Nora, on voit aussi comment les parents influencent leurs enfants. C’était tendu et bien fait, et il y a pas mal de suspense puisqu’une conspiration essaie d’empêcher la prof de Nora à participer au vote. Les apprenti·es sont bien décidé·es à la protéger !
J’ai beaucoup aimé rencontrer de nouveaux personnages au cours de ce tome, et encore une fois, explorer des enjeux au travers d’une métaphore, tout en ayant des personnages qui, dans le monde réel, seraient concernés par des injustices similaires.
L’Éveil des Sorcières est une excellente trilogie pour la jeunesse. Il y a de la magie, de l’aventure, de l’émotion, toutes très bien entremêlées pour une histoire où on traite d’oppression à la fois par des métaphores et du concret. J’aurais adoré lire ça enfant – et j’ai aussi adoré cette histoire en tant qu’adulte.
Radar à diversité : narratrice grosse, couple m/m secondaire (parents), personnage secondaire malentendante et lesbienne, couple f/f secondaire, personnage secondaire racisé
Avertissements : harcèlement scolaire sexiste et sexuel (tome 1)
Une réflexion sur « Trilogie L’Éveil des Sorcières de Cordélia »