Je lis peu de Webtoons : je n’aime pas trop lire de BD ou mangas en ligne, ni d’histoires en cours : or, Webtoon, c’est souvent les deux ! Mais de temps en temps, j’essaie de changer mon quotidien pour ne pas m’enliser dedans, et j’ai fait quelques découvertes sur Webtoon à cette occasion : Boyfriends, Nouveaux Départs, Les Vampires Anonymes.
Dans ce Webtoon écrit par une personne trans indonésienne, on suit quatre personnages archétypaux : Nerd, Jock, Prep et Goth, qui tombent amoureux les uns des autres. Malgré leur abord stéréotypé, les personnages ont tous des ethnies différentes, il y a un mec trans et une personne genderfluid, certains sont sur le spectre ace…
Les relations à deux sont valorisées, et on nous montre l’importance du travail relationnel. Être amoureux, ce n’est pas évident, et Prep s’interroge beaucoup sur sa manière d’exprimer son affection : il a dû mal avec les gestes ou les mots tendres et redoute que les autres pensent qu’il ne les aime pas. Je me reconnais beaucoup là-dedans !
En revanche, j’ai été déçue qu’ils décident, « évidemment », d’être dans une relation exclusive à quatre. Ils ont eu trois crush en une semaine et n’envisagent pas qu’ils pourraient tomber amoureux d’autres ??? Ça m’aurait paru logique qu’ils se disent qu’ils n’auraient pas de temps à consacrer à une personne de plus, mais là, l’exclusivité est présentée comme une évidence.
Les scènes sexuelles tombaient comme un cheveu sur la soupe – on a à la fois l’impression qu’ils sont super-expérimentés et qu’ils découvrent l’existence du sexe pour la première fois – avec un consentement étrange : ils se demandent toujours la permission pour s’embrasser, mais pas pour d’autres choses. Le vocabulaire n’aidait pas : j’ai lu la VF et « poupée » comme « bébé » sont des petits noms affectueux qui m’irritent.
Quand j’ai découvert une autre BD de l’auteur – en indonésien, donc difficile à lire pour moi –, j’ai été frustrée : les dessins sont tellement plus beaux ! Boyfriends a un style très simple et j’avoue que je ne suis pas fan.
Bref, je suis mitigée sur Boyfriends. J’ai lu jusqu’à la dernière update car j’étais en gros manque de bandes-dessinées polyA, mais depuis, je n’ai pas lu les autres chapitres parus.
Quand Sita Tout Court est revenu sur sa chaîne Youtube, j’ai ressenti plein d’émotions positives. C’est une personne que je suis depuis un bon bout de temps – six ans ? Plus ? – et voir que son parcours et le mien étaient parallèles m’a fait très plaisir. On commence comme fans de Fullmetal Alchemist, et là, Sita annonce avoir publié un Webtoon polyA et ace !
C’est donc avec beaucoup d’enthousiasme que je suis allée lire le Webtoon en question, Nouveaux Départs. L’histoire s’ouvre sur l’enterrement d’Echo, décédé dans un accident ridicule. Wei, son ex, voit alors soudain son fantôme.
Ensemble, ils enquêtent sur les déboires amoureux des autres, plutôt de se concentrer sur les leurs. Kali, la petite amie d’Echo, vit très mal son décès, mais Echo refuse de l’impliquer. Au fil du récit, on en apprend davantage sur leur passé. Pourquoi l’amitié entre Wei, Kali et Echo était-elle rompue ? Était-ce parce que Kali était amoureuse des deux ? Etait-ce l’asexualité de Wei ? Etait-ce parce que chacun avait un crush sur un autre et qu’iels ont mal communiqué ?
Webtoon, ce n’est vraiment pas mon truc. Sur portable, c’est minuscule. Il y a des Webtoon qui passent plus ou moins bien sur ordi, mais Nouveaux Départs n’était pas du tout adapté à ce format-là. Si je gardais un zoom normal, les dessins étaient fractionnés, je ne voyais pas l’action du personnage en même temps que sa bulle de discours. Si je dézoomais, je devais plisser les yeux pour lire. Je n’ai pas vraiment trouvé de juste milieu, alors je mettais en grand et faisais des allers-retours pour voir ce qu’iels font, lire, puis redescendre pour avoir la suite.
Nouveaux Départs est une BD haute en couleur : les personnages crient sans cesse de joie, de détresse ou de colère, font de grands mouvements. Avec en plus les couleurs vives des dessins, ça faisait beaucoup, et j’avoue que j’étais parfois fatiguée de la n-ième discussion en lettres majuscules où tout le monde s’interrompt dans tous les sens. Je sais que les Webtoon sont pensés pour une lecture épisodique : ce genre de récit fonctionne mieux dans ce cas. Les émotions fortes rendent un chapitre marquant, donnent envie de lire la suite… mais ça ne s’enchaine pas très bien.
J’ai bien aimé l’histoire, la situation des personnages est très bien trouvée, et j’ai vraiment adoré tout le récit de leur passé. J’attendais avec impatience chaque flashback ! C’était bien joué de mettre en scène des personnes aux caractères différents, et dans des relations complexes. Ça permet de découvrir des aspects relationnels nuancés : au lieu d’un discours vu et revu sur les insécurités et la jalousie, on découvre un point de vue unique, propre aux personnages et à leurs relations. C’est ce qui m’avait manqué dans La Salope Ethique : les conseils étaient trop universels. Là, on est aspiré dans le récit, on a un exemple spécifique. J’étais immergée dans Nouveaux Départs, et ça me permet, d’une certaine manière, d’acquérir plus d’expérience. En vivant les drames relationnels des autres plutôt que les miens !
Les messages transmis par Nouveaux Départ à travers les relations secondaires m’ont également beaucoup plu. Au bout d’un moment, ça faisait quand même beaucoup de romances ! Mais chaque situation avait ses particularités, et ses points communs avec la relation principale : ces « détours » contribuaient à l’histoire globale.
Nouveaux Départs est un bon Webtoon, avec une histoire originale qui m’a permis d’étendre mes imaginaires et horizons polyamoureux. Le format n’était pas adapté à la lecture que j’en ai faite, et quand je l’ai terminé, j’ai souhaité très fort qu’il soit édité en version papier. Sauf que je sais que ça nécessiterait un gros travail de redécoupage… Mais qui sait, s’il a assez de succès, ça pourrait être le cas. Alors filez vite le lire !
C’est Cordélia qui avait suggéré ce Webtoon pour son club de lecture, avec un argument imparable : il est terminé ! Pour moi qui déteste être laissée en plan par une histoire, c’est très rassurant. Mais les dessins ne me plaisaient pas, et c’est finalement bien plus tard, alors que je m’intéressais à la manière dont d’autres auteurices explorent les mythes autour des vampires, que je me suis plongée dans cette BD.
Les Vampires Anonymes suit Marietta, une vampire participant aux séances des V.A., un groupe souhaitant avoir une mort-vie éthique et ne pas faire du mal aux humain·es. Marietta est amoureuse d’une humaine, et si résister à l’envie de la mordre n’est pas un problème, elle se comporte à la manière d’Edward dans Twilight et la stalke ! De plus, elle tombe sur son ex-ami, Adam − qui tuait ses amoureuses et a fini par essayer de la tuer, elle, lorsqu’elle a rejoint les V.A. Pour la reconquérir, il se fait passer pour son crush sur Instagram…
On suit également les déboires d’Yvan, autre membre des V.A. qui sort avec un humain et galère à maintenir son identité vampirique secrète. L’aspect polyA est assez secondaire, même s’il touche des personnages importants.
L’histoire repose sur des ressorts comiques, et mon principal souci, c’est que je n’ai pas trouvé ça drôle. Je pense que si l’humour nous parle, c’est une excellente BD ! Il faut accepter que les personnages vont tuer des humain·es, et le regretter comme on regrette d’avoir cassé une assiette – l’œuvre ne cautionne pas l’absence de morale des personnages, mais on est quand même censé rire de l’absurdité des situations.
Pourtant, sous ses dehors comiques, Les Vampires Anonymes aborde des sujets complexes, comme l’amitié toxique entre Adam et Marietta, et ses efforts pour devenir une meilleure personne. C’était assez difficile pour moi de m’investir émotionnellement dans ces sujets sérieux – les personnages suivent des thérapies et tout – alors qu’à côté les meurtres étaient rigolos, et qu’il n’y avait pas de thérapie pour ça. J’ai lu des œuvres qui réussissent à trouver le juste équilibre, et j’ai une amie qui a beaucoup aimé Les Vampires Anonymes, mais ça a moins fonctionné pour moi.
Je ne suis toujours pas vraiment convaincue par le format Webtoon, mais quand les œuvres des maisons d’édition sont insuffisantes, lire en ligne est une bonne solution. Je crois que je n’avais, avant Boyfriends, jamais lu de BD narrative explicitement polyA. Je pense que c’est en partie pour ça que j’ai poursuivi ma lecture même si j’étais mitigée ! Il faut vraiment que davantage d’œuvre en lignes soient imprimées… avec la publication récente de Cosmoknights, on est en bonne voie, alors je croise les doigts pour Nouveaux Départs !
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