Josée le tigre et les poissons de Seiko Tanabe & Nao Emoto

personne en robe verte lisant Josée le tigre et les poissons de Seiko Tanabe & Nao Emoto au milieu de feuilles d'automne qui volent

Alors que je visitais une librairie avec l’un de mes chéri·es platoniques, nous sommes tombés sur le manga Josée le Tigre et les Poissons. Il avait vu le film et me l’a chaudement conseillé : il avait bien aimé la représentation handie, car on y suit une jeune femme en fauteuil. N’étant toutefois pas très portée sur les films, j’ai fait comme pour Je Veux Manger ton Pancréas et j’ai lu le manga, qui compte deux tomes.

Josée, le Tigre et les Poissons est une œuvre absolument magnifique. D’habitude, j’essaie de commencer par un petit résumé pour que vous ayez une idée de quoi je parle, mais ma première impression était la beauté des dessins : ça s’ouvre sur plusieurs pages sans paroles où Takeo, le personnage principal, nage au milieu des poissons et des coraux. Les détails sont présents mais pas trop chargés, on sent le mouvement du nageur et des bulles, les reflets sur les écailles des poissons, et surtout, on ressent le calme sous l’océan.

Tout au long de l’histoire, les dessins gardent cette qualité, et il y a plein de scènes sans paroles. Parfois, j’ai compté, juste pour voir : douze pages sans texte, à un autre moment, seize pages sans texte… Parfois, c’est parce que les personnages ne parlent pas, mais à d’autres moments, on les voit parler sans avoir leurs mots : on devine aux expressions. Ça crée une ambiance particulière, calme, belle, presque musicale ? J’espère que l’animation du film est à la hauteur : tout serait gâché par des mouvements saccadés. Alors qu’au contraire, ces passages sont parfaits pour un moment musical…

double page sans paroles où un plongeur observe des poissons

Takeo rencontre par hasard Josée, une jeune femme en fauteuil roulant. Il économise pour étudier au Mexique, et accepte donc la proposition de la grand-mère consistant à devenir le « gardien » de Josée : son travail est d’obéir à tous ses ordres, mais de ne jamais la laisser sortir.

J’ai vraiment aimé Takeo comme Josée : on comprend très vite leurs sentiments et ils sont intéressants à suivre. Ils commencent peu à peu à briser les règles, donnant lieu à des scènes très belles et émotionnelles où ils vont à la mer…

Ce manga souffre toutefois de quelques faiblesses scénaristiques. On y retrouve le ressort assez éculé du personnage qui fait exprès d’interdire quelque chose pour pousser l’autre à franchir cet interdit – pourquoi ? Pourquoi je vois ça aussi souvent ? D’où un parent qui insulte son enfant c’est « pour l’aider à s’affirmer » ? D’où un parent qui empêche sa petite-fille handicapée de sortir c’est « pour qu’elle trouve en elle-même la motivation de le faire seule » ?

On a aussi l’obligatoire triangle amoureux dévoré par la jalousie et les attitudes toxiques. Même si c’est un cliché qui m’agace, ici ça permet au moins de voir d’autres facettes du validisme, donc pourquoi pas. Pareil, je commence à en avoir assez des grandes scènes dramatiques où les personnages sont si occupés à se crier dessus qu’ils finissent par avoir un accident, mais ici ça permet à l’intrigue d’explorer des questions intéressantes. J’aurais vraiment préféré que l’auteur réussisse à amener l’évolution des personnages sans recourir à ces ficelles grossières, mais je peux comprendre leur utilité.

La romance qui se développe entre les personnages m’a laissée ambivalente. Leur relation était chouette niveau amical et émotionnel, mais je ne le sentais pas plus que ça côté romantique. Cependant, leur couple est très sain, ce qui est toujours appréciable, et peut-être qu’il enthousiasmera davantage les lecteurices aimant les romances en général.

L’histoire s’attache à montrer l’importance de l’indépendance pour les personnes handies, ainsi que les outils qui aident en ce sens. C’est d’autant plus chouette que c’est une toile de fond plus qu’un focus : on voit la vie de Josée s’améliorer, et si on regarde pourquoi, on peut constater qu’elle a trouvé un métier qui la passionne, qu’elle a de meilleures aides à la mobilité, et davantage de contacts sociaux. Plutôt que d’expliquer, Josée, Le Tigre et Les Poissons montre, ce que je trouve toujours plus fort.

double page sans parole où les personnages se regardent

Il y a un passage très chouette où Josée lit un album qu’elle a créé. Cette histoire fait un parallèle peu subtil avec ce qu’elle vit – ou plutôt, avec sa vision de ce qu’elle vit : je ne suis pas forcément d’accord avec son interprétation. J’ai pu pas mal me retrouver dans sa manière d’utiliser le réel pour alimenter la fiction. Et puis, j’adore les albums, j’adore les contes – l’album de Josée à le ton d’un conte – alors forcément, ce moment-là m’a plu. Il était très émotionnel, avec encore une fois plein de pages sans paroles, et j’ai fini bouleversée.

Josée, le Tigre et les Poissons est un magnifique manga qui, malgré un scénario un peu simple, parle de handicap avec finesse, notamment grâce à ses personnages complexes. J’ai ressenti beaucoup d’émotions, et peut-être que je me déciderai à regarder le film. Si l’animation est à la hauteur !

Radar à Diversité : cast japonais, pp en fauteuil

Avertissements : accident routier, validisme

 

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