J’ai lu Cosmoknights en ligne lorsque le tome 1 a été terminé, et j’ai adoré. J’attendais donc avec impatience que tous les chapitres du tome 2 soient publiés, et j’étais tellement concentrée sur la prochaine parution de la version papier que la traduction du tome 1 m’a totalement prise au dépourvu. Quoi, cet obscur webcomic de 2019 allait être imprimé en France ?
La publication de webcomics – ou d’histoires initialement sorties en ligne – me donne beaucoup d’espoir pour l’avenir de la littérature. Internet est une zone de liberté : sans les contraintes du monde de l’édition, on y voit des récits qui sortent tellement plus des sentiers battus !
Quand je m’imagine des histoires, les personnages ressemblent à mon groupe d’ami·es : que des personnes queer. Mais dans les livres en librairie, il y a le vernis de l’acceptabilité. Un peu de représentation, mais pas trop. Deux personnages queer dans un seul livre, c’est déjà beaucoup ! En ligne, on trouve des histoires qui correspondent à mes rêves. Pas de maisons d’éditions qui sélectionnent ! Que ce soit pour Dans Un Rayon de Soleil, Le Cercle du Dragon-thé ou Cosmoknights : voir que ça arrive sur le circuit de publication classique… c’est génial.
Le tome 1 de Cosmoknights nous présente d’abord la jeunesse de Pan et son amitié avec Tara, la princesse de la planète où elles grandissent. Pan l’aide à échapper au tournoi de cosmoknights, où elle sera mariée au sponsor du vainqueur.
Quelques années plus tard, deux cosmoknights débarquent chez Pan pour être soignées en toute discrétion. Bee et Cass jouent sans sponsor pour libérer les princesses, et enthousiasmée, Pan les accompagne dans leur prochaine mission.
Ce tome 1 est survoltant ! Il y a quelque chose de galvanisant à voir des femmes s’allier pour lutter contre un système oppressif, et quand cette lutte se fait dans une arène avec des chevaliers de l’espace, c’est épique. Les courses-poursuite avec une femme mystérieuse, les joutes ; chaque péripétie était pleine de suspense.
J’ai adoré les dessins, alors que le trait est typique des comics – police d’écriture peu lisible, bulles envahissantes, petites cases et traits durs : d’habitude, je n’aime pas du tout. Je suis peu fan des moments où les dialogues s’enchainent, mais il y a des illustrations pleine page magnifiques. Les couleurs sont éclatantes, et les décors spatiaux si beaux !
Le design des personnages m’a également beaucoup plu, car il dégage beaucoup de complicité et de contentement queer. Il y a des moments qui sont tellement gratuits, juste là pour nous montrer la musculature de Cass ! Avec Pan qui rougit de la voir faire craquer ses articulations, c’est parfait. C’est assez proche de ce que j’avais ressenti en regardant She-Ra : cette œuvre est écrite pour moi. Pour notre plaisir visuel en tant que queer.
L’humour est également au rendez-vous, et j’ai ri à de nombreuses reprises, surtout dans les moments où j’éprouvais de la complicité avec les personnages. Pan qui craque sur toutes les filles qu’elle croise est si compréhensible, mais c’est aussi très drôle.
Évidemment, après avoir lu la VF du tome 1, je n’ai pas pu m’empêcher d’enchaîner avec le tome 2. Ça s’arrête sur un tel cliffhanger !
Je ne m’y attendais pas, mais le tome 2 est encore plus incroyable que le tome 1. D’accord, il n’est pas terminé, alors mon jugement est peut-être hâtif, mais il y a 239 pages sorties en lignes, et c’est… renversant. Je ne pensais pas que Cosmoknights pouvait mieux – c’était déjà si bien !
Alors que le tome 1 était du pur plaisir vindicatif, la suite nuance les thèmes abordés. Il ne s’agit plus uniquement de sauver des princesses en cognant sur des chevaliers : à l’équipe s’ajoute une anarchiste qui veut supprimer les jeux. Sauver une femme de temps en temps lui parait inutile, car les habitant·es des planètes continuent de trimer pour que la noblesse s’enrichisse.
On rencontre également une princesse qui ne veut surtout pas être sauvée : son mariage forcé est l’occasion d’avoir plus de pouvoir, et d’aider les habitants de sa planète – une affirmation nuancée par l’anarchiste, qui rappelle qu’on n’a du pouvoir et de l’argent qu’aux dépends d’autrui. Même une personne souhaitant utiliser ses moyens avec de bonnes intentions participe au système précarisant les plus pauvres.
L’arrivée de ces nouveaux personnages clive Bee et Cass : Bee en a assez d’être seule et accueille ce soutien avec plaisir, tandis que Cass se méfie et préfère que leur couple soit isolé, uni contre le reste du monde. Leurs dialogues étaient très intéressants, et j’ai vraiment apprécié que Bee soit davantage développée. Elle était un peu transparente dans le tome 1, mais on découvre son passé, ses objectifs, ses regrets. Tara est également plus centrale au récit, et j’ai adoré ses passages.
Cosmoknights est une BD passionnante. Je me suis abonnée au site et j’ai vraiment hâte que les prochaines pages sortent ! L’ambiance de lutte contre le patriarcat est jouissive, et d’autant plus galvanisante que les positions des personnages sont nuancées. Avec des dessins époustouflants en prime, c’est vraiment un grand coup de cœur.
Radar à diversité : pp saphiques, pp noires, couple f/f, perso secondaire femme trans, perso secondaire grosse
Avertissements : sexisme (dénoncé), combats et blessures
Une réflexion sur « Cosmoknights de Hannah Templer »