Je ne savais pas du tout que la BD Nimona devait être adaptée en film ! J’ai eu la surprise, un jour, de voir la bande-annonce s’étaler sur ma page d’accueil Netflix, et évidemment, ça m’intéressait : j’ai donc proposé à mes chéri·e·s platoniques qu’on regarde le film ensemble.
Nimona est l’adaptation parfaite. Peut-être que c’est parce que l’auteurice est à la réalisation ? Je n’aime pas trop les œuvres, qui, comme Je Veux Manger ton Pancréas, sont identiques au format papier et vidéo : je m’ennuie si c’est exactement pareil ! D’un autre côté, je vis comme une trahison les adaptations que ne respectent pas du tout l’original (… Percy Jackson…).
Le parfait entre-deux, c’est Nimona. Le film est fidèle à la BD en esprit, mais le scénario est très différent. On a l’impression que c’est une œuvre dans la même lignée, qui étend l’univers, complexifie les idées et creuse les personnages. Et si on lit la BD après avoir vu le film, pareil : on découvre une autre facette, d’autres thèmes dans la même ambiance.
La BD semble avoir été publiée dans un format épisodique, et les premiers chapitres sont des gags un peu décousus, avec beaucoup de scénario ajouté sur la fin. Le film, lui, a une histoire continue de bout en bout, et un univers plus développé : par le passé, l’héroïne Gloreth a repoussé un monstre, et maintenant, dans une cité hyper-technologique protégée par des remparts, des chevaliers d’ascendance noble perpétuent son héritage, le héros Ambrosius en tête. La reine décide, pour la première fois, d’adouber un roturier : Ballister. La cérémonie tourne au drame lorsque son épée la tue : il devient alors le criminel le plus recherché du royaume. Nimona est ravie de voir que quelqu’un d’autre est détesté par tout le monde, et décide de devenir son sidekick.
Dans le film, Nimona est sûr·e de son identité. Elle répète à plusieurs reprises « je suis Nimona », et ce sont les autres qui s’interrogent sur ce qu’elle est. Une petite fille avec des pouvoirs de métamorphe ? Un monstre déguisé en fille ? Ou en garçon, parfois ? Dans la BD, la quête de son identité était centrale – notamment, elle perdait partiellement la mémoire en se transformant. Cette question-là est passionnante, mais les certitudes de la Nimona du film permettent de faire passer un message plus clair sur la transidentité.
Ballister : D’ailleurs, comment t’es devenue comme ça ?
Nimona: I summoned my courage, held the coin tight, threw it into the well, and made a wish. A wish to one day be trapped on a subway
Plusieurs sujets sont abordés discrètement, comme celui du classisme, avec la discrimination de Ballister, ou encore l’extrême droite – la directrice qui appelle à « protéger leur mode de vie », les chevaliers qui évacuent des manifestants « pour leur sécurité ». Un moment qui m’a vraiment marquée quand j’ai revu le film est Ballister qui veut sortir de sa poche un portable qui prouve son innocence, læ coupable qui crie « il a une arme » et les chevaliers qui tirent. En 2018, deux policiers ont tué un jeune afro-américain en affirmant avoir confondu son portable avec une arme, et je doute que cette scène soit un hasard – la preuve aurait pu être sur une clef usb.
La relation entre Ballister et le chevalier Ambrosius était plus ambigüe dans la BD, puisqu’il était directement complice de l’exclusion de Ballister. Ici, on voit qu’ils sont amoureux, on voit davantage les doutes d’Ambrosius – avec une scène géniale qui se moque des supérieurs hiérarchiques demandant si on va bien – et un ami qui ne connaissait pas la BD a beaucoup aimé qu’on prenne à revers ce qui s’établissait comme une rivalité, tous deux étant diamétralement opposés. Cependant, on voit en quoi le système le corrompt, et comment ses préjugés l’amènent à des erreurs – c’est sa mauvaise opinion de Nimona qui le pousse à s’opposer à Ballister lorsque celui-ci dénonce l’Institut.
Le film contient beaucoup d’humour – Nimona est si drôle ! – et heureusement : le sujet principal rendrait le film très dur, sinon. Nimona est haïe par tout le monde, avec toute une société qui la traite en monstre, des enfants qui sont encouragé·es à tuer les monstres… elle ne va pas bien, et Ballister n’est pas soutenant tout de suite, loin de là. C’est d’ailleurs super de voir son évolution !
La BD était cependant beaucoup plus dure et déprimante – elle parlait notamment de torture au nom de la science, et Nimona tuait beaucoup de gens. Encore une fois, les deux œuvres sont complémentaires, et je trouve ça pas plus mal que le film soit moins violent !
J’ai été déçue de la fin sur plusieurs aspects. Elle est courte et ouverte, ce que j’aime bien, mais ce qu’on en voit… sans spoiler, il y a cette image très clichée d’un chevalier jouant au foot avec des enfants, censée sous-entendre que c’est bon, les chevaliers sont gentils. C’est une image très utilisée en propagande, alors que le reste du film semblait davantage amener à un démantèlement des chevaliers. J’ai aussi été déçue de voir la technologie s’étendre au reste de l’univers.
J’ai vu Nimona deux fois en quelques semaines, ce qui m’a permis de remarquer d’autres détails et de constater que les sous-titres français genraient Nimona à l’inclusif. Pour le deuxième visionnage, je redoutais que ça soit répétitif, mais j’ai de nouveau adoré ! Maintenant, j’ai hâte de relire la BD pour me souvenir de tous les autres thèmes explorés, et y réfléchir encore et encore…
Radar à Diversité : pp non-binaire, pp gay/bi et racisé, couple m/m
Avertissements : cruauté, meurtres sous-entendus, violence (combats, sang, amputation, tirs), tentative de suicide
Une réflexion sur « Nimona − Film Netflix »