Lors du Asian Readathon 2022, j’ai à nouveau consulté les répertoires de Delphreads et Planète Diversité pour trouver des romans en français écrits par des auteurices asiatiques. L’année dernière, j’avais déjà emprunté Parfums d’amour de Stacey Lee sans jamais le lire. J’ai été tentée de recommencer, mais j’ai vu qu’un autre de ses romans était présents sur le répertoire : La Vie vue d’en Bas. Comme souvent, quand je ne lis pas un livre, il y a une raison, j’ai décidé qu’il était plus prudent d’en essayer un autre.
J’ai commencé à lire La Vie vue d’en Bas bien après la fin du readathon. L’histoire se passe à Atlanta en 1890, et on y suit Jo, une jeune Chinoise qui juste après avoir perdu son emploi, se rend compte qu’elle pourrait aussi se retrouver sans toit. Comme les Chinois·es n’ont pas le droit de louer ou d’acheter des logements, son père adoptif et elle squattent la cave de la famille Bell, qui l’ignore, et Jo découvre que les Bell risquent de déménager : leur journal se vend mal et à moins d’obtenir de nouveaux abonnés, ils ne pourront pas payer leur loyer.
Jo décide donc d’écrire des articles pour ce journal, où elle critique la société.
Minute… tout ça me paraissait fort familier… Pourtant, le titre et la couverture ne me disaient rien avant que je ne les découvre pour le Readathon… Mais oui ! J’en avais entendu parler dans une vidéo de Cindy :
La couverture et le titre sont bien différents, pas étonnant que je n’aie pas reconnu ! J’ai déjà fait des articles sur les différences entre couvertures VO et VF et sur les traductions de titres, mais ne connaissant pas celle-ci, je n’en avais pas parlé… Je trouve le titre français tout aussi bien que l’anglais, par contre la couverture ! Encore une fois, les éditions françaises montrent qu’elles ne veulent surtout pas que le fait que la héroïne est Chinoise se voie, et alors que la VO représente bien une fiction historique, la couverture française – en plus d’être hideuse – est moins parlante. C’est si dommage…
En re-regardant la vidéo de Cindy, je me suis rendue compte qu’on ne racontait pas du tout l’histoire de la même façon, et qu’on n’avait pas la même vision de ce qu’était le cœur du roman. Pour elle, c’est le fait qu’à travers ses articles, Jo se sent de plus en plus émancipée et s’autorise à avoir des opinions plus radicales par rapport au racisme et au sexisme. Le climax du bouquin serait la posture délicate de Jo lorsque ses articles ont tellement de succès qu’ils ont un impact sur les habitant·es d’Atlanta, qui s’interrogent alors sur l’identité de l’autrice…
Pour moi, c’était plutôt une histoire composée d’une multitude d’éléments, centrés autour de Jo. J’ai beaucoup aimé ce personnage, alors ça a très bien fonctionné ! Il y a mine de rien beaucoup de facettes à cette histoire : sa relation avec son père adoptif et le mystère de ses ennuis avec un escroc ; sa relation avec Catherine, la fille qu’elle sert et qui est odieuse avec elle ; la liaison de celle-ci avec le fiancé d’une autre ; ses articles et l’intérêt que lui porte Nathan Bell, qui les publie et ignore qu’elle le connait depuis l’enfance, les lois racistes qui fleurissent et le mouvement des suffragettes… pourtant, on n’a pas pour autant l’impression que c’est un livre confus, ou trop dispersé : chaque élément est influencé par les autres et les influence lui-même, ils se relaient avec fluidité et créent une histoire globale solide.
J’ai aussi apprécié que malgré ses thèmes plutôt durs – le racisme, la précarité, le sexisme – ça reste un livre à l’ambiance légère, peut-être de par son écriture fluide et simple. On peut s’offusquer, tout en passant un bon moment. C’est peut-être aussi parce que c’est une histoire du passé, et que je ne me suis pas sentie très concernée, que j’ai pu apprécier ce roman.
La Vie vue d’en Bas est une fiction historique mettant en avant des éléments dont je n’avais pas connaissance, et qui, sous couvert d’une histoire légère et entrainante, enseigne et questionne. Même si des sujets difficiles sont abordés, j’ai passé un très bon moment : l’équilibre est bien trouvé et Jo est très attachante.