Bilan Challenge des 4 Maisons − Partie 2

Voici la suite de mon bilan, je continue donc de vous présenter des livres écrits par des personnes trans ou non-binaires, avec des personnages trans ou non-binaires ! Et comme le premier livre de la partie un était d’Alex Gino, je vais récidiver ici.

personne en tenue de sport lisant Tu crois tout savoir Jilly  P! d’Alex Gino sur un toboggan
Tu crois tout savoir Jilly P ! d’Alex Gino

J’ai emprunté Tu crois tout savoir Jilly P ! alors que je rendais George, par Alex Gino aussi, par curiosité, sans savoir de quoi ça parlait. Une bonne décision : je l’ai lu d’une traite un après-midi et j’ai passé un super moment.

Le titre comme le résumé laissent entendre qu’elle pense tout savoir, et ça me laisse un peu perplexe : Jilly ne croit pas tout savoir… c’est juste une fille de 12 ans passionnée par la série Mystérieux Enchantement en Vidalie, au point qu’elle va tous les jours discuter avec d’autres fans sur un forum.

Lorsque sa petite sœur Emma nait et que les médecins constatent qu’elle est Sourde, sa vie est bouleversée. Influencé·es par une audiologiste validiste, les parents vivent mal la nouvelle et Jilly essaie de les pousser à apprendre la langue des signes.

Jilly est très attachante, le style d’écriture est fluide, ce qui a rendu la lecture agréable malgré de nombreux moments inconfortables. Il y a notamment toutes les scènes avec l’audiologiste qui veut forcer Emma à oraliser, mais aussi celles où Jilly se montre validiste et refuse dans un premier temps d’admettre ses biais.

Ce qui m’a étonnée, car le résumé ne l’annonçait pas du tout, c’est la discussion autour du racisme qui a lieu tout au long du roman. La tante et les cousins de Jilly sont noir·es, tout comme son ami en ligne qui est Sourd aussi. Dès le début, Jilly découvre la violence policière par le biais des informations, et le silence de ses parents qui changent de sujet lorsqu’elle l’évoque. Mais elle voit aussi que sa propre famille est raciste, que ce soit volontairement ou par maladresse. Son questionnement accompagne celui qu’elle traverse sur le validisme et la surdité. L’auteurice précise à la fin qu’iel a volontairement écrit un roman jeunesse du point de vue d’une blanche entendante pour inviter enfants et adultes à se remettre en question aussi. Ce mot de la fin permet aussi de comprendre la relation entre Alex Gino et la communauté Sourde.

Je trouve que ce livre pousse bien au questionnement, en montrant plutôt qu’en disant. Il ne se contente pas de dénoncer, mais s’efforce aussi de donner un modèle. Il n’a pas du tout un ton pédagogique : il est entrainant et se lit très bien. Je pense que je devrais le relire en le savourant : j’étais tellement prise dedans que je l’ai lu en une heure et j’ai peur que sur le long terme, il ne me reste pas grand-chose en mémoire…

personne en chemise pâle et écharpe La Vague lisant Tous les Oiseaux du Ciel de Charlie Jane Anders devant la plage
Tous les Oiseaux du Ciel de Charlie Jane Anders

Tous les Oiseaux du Ciel de Charlie Jane Anders était dans ma liste de livres avec de la représentation ace, et en plus c’est de la SF ! Je l’ai recommandé pour le club de lecture aro ace et alors que d’habitude je laisse trainer les livres très longtemps dans ma PAL, j’ai décidé de le lire pour éviter d’oublier qu’il y avait un personnage secondaire ace. Bon, finalement, j’aurais mieux fait d’oublier : c’est un personnage qui apparait pendant 5 pages et son « coming out » est très ambigu. Si ça se trouve, elle n’est même pas ace…

Au début, j’ai eu du mal à comprendre où allait l’histoire : on découvre d’un côté Patricia, qui parle aux oiseaux et découvre ses capacités de sorcières, et de l’autre Laurence, qui invente une machine pour avancer de deux secondes dans le futur. Plutôt absurde ! Tous deux se rencontrent à quatorze ans et deviennent ami·es, alors qu’un assassin veut les tuer pour empêcher qu’iels ne provoquent la fin du monde.

Dans un tel contexte, on s’attendrait à une histoire épique, mais c’est au contraire calme et quotidien. Et frustrant : leurs parents sont négligents, les autres élèves les harcèlent…

Le style narratif et l’ambiance m’ont beaucoup fait penser à Poppy et les Métamorphoses ou encore Tobie Lolness : des situations absurdes sont décrites avec beaucoup de sérieux, c’est vraiment comique. Par exemple ici, lorsque Laurence est parti visiter une fusée en cachette et que ses parents le retrouvent et le grondent :

« Sur le chemin du retour, il n’écouta pas son père et sa mère lui expliquer que la vie n’était pas une aventure, bon sang, que ce n’était qu’une longue épreuve et une accumulation de responsabilités et de contraintes. Lorsqu’il serait assez grand pour faire ce qu’il voulait, il comprendrait alors qu’il ne pouvait pas faire ce qu’il voulait. »

couverture de Tous les Oiseaux du Ciel de Charlie Jane Anders

L’histoire reprend lorsqu’iels sont adultes et se croisent par hasard. Patricia est devenue une sorcière, Laurence un ingénieur. Les catastrophes climatiques s’enchainent et tous deux essayent de sauver le monde… Mais là aussi, pas de sentiment d’urgence ou d’aventure : la situation est terriblement quotidienne. Comme si c’était normal.

C’est intéressant comme approche, et plutôt réaliste : face à des bouleversements inquiétants, on ne part pas en quête pour sauver le monde, on poursuit sa vie au mieux. C’est un peu ce qui se passe en ce moment : dans les romans, l’apparition d’un virus est souvent la cause de la fin du monde, et les héros essaient de sauver tout le monde – ou survivent dans les décombres. Mais nous nous adaptons et continuons notre vie de tous les jours tant bien que mal, et c’est aussi ce que font les personnages du roman.

Du coup, ce n’est pas exactement mon type d’histoire, malgré un style que j’ai beaucoup aimé.

personne lisant Buffalo Belle d’Olivier Douzou dans des escaliers en bois
Buffalo Belle d’Olivier Douzou

Durant un week-end avec des ami·es, on m’a prêté cet album qui suit Buffalo Belle, un·e enfant non-binaire. Je ne suis pas particulièrement fan des dessins crayonnés en noir et blanc, mais… c’est un livre avec des jeux de mots. Je ne sais pas si je l’ai beaucoup dit ici : j’adore les jeux de mots ! C’est trop rare dans les livres que je lis, et la plupart du temps, ils sont présentés comme des blagues nulles, alors que excusez-moi, c’est génial.

Ici, le jeu repose sur l’inversion entre il et elle. « Buffalo Belle est très virelle ! » Le texte a des airs de comptine, c’est très joli. Je regrette un peu que les phrases n’aient pas un sens nouveau avec l’inversion – ou alors, c’est le cas et je ne l’ai pas compris ? Il faudrait que je relise…

Bref, c’est un album très sympa !

couverture de la bande-dessinée Magasin Généralouverture de la bande-dessiné l’Arabe du Futurouverture de la bande-dessiné La Voiture d’Intisarcouverture de l’album c’est moi le plus fort

Ce week-end-là a été l’occasion de lire pas mal de livres des personnes qui m’accueillaient : Magasin Général, L’Arabe du Futur, La voiture d’Intisar, C’est moi le Plus Fort… J’ai aussi relu les albums que j’avais apportés pour mes ami·es, mais ça, je ne les compte pas.

couverture du webcomics Random Acts of Katness
Random Acts of Katness de The Yuri Canon

Après une discussion avec une personne qui regrettait l’absence de représentation intersexe, j’ai écumé internet et je suis tombée – entre autres − sur ce webcomic. Ce sont des scènes tirées de la vie de l’auteurice, Kat, qui se présente ainsi :


première page de Random Acts of Katness

C’est très dynamique : la plupart des histoires font une ou deux pages. On passe d’une humeur à l’autre en un éclair, car les blagues sont entrecoupées de scènes sur le validisme, la transphobie… Dans l’ensemble, Kat est adorable et c’est un plaisir de suivre ses journées ! Je l’ai lu très vite car il n’y a qu’une quarantaine de pages, mais j’y reviens de temps en temps. C’est une BD en cours et j’espère que d’autres histoires sortiront bientôt !


couverture du webcomics Puu de Nabi H. Ali
Puu de Nabi H. Ali

J’avais commencé ce webcomic il y a un an : il est dans les suggestions de Tapas, que je découvrais à l’époque. En reprenant sa lecture, je me suis rappelé pourquoi j’avais abandonné : sur les premières pages, l’écriture parait floue, et les dessins sont très différents de ce dont j’ai l’habitude. J’avais même le réflexe de penser que c’était mal dessiné, mais j’ai dû réviser mon jugement par la suite. Certes, l’auteur a bien progressé depuis ! Mais dès le début, le style est volontaire, je m’en suis rendue compte lorsqu’il change en fonction des émotions. On a parfois des pages en noir et blanc, d’autres qui dégoulinent, d’autres où les couleurs se mêlent…

plusieurs pages de Puu de Nabi H. Ali

Entre les dessins souvent métaphoriques, les nombreux personnages et le contexte culturel que je ne connaissais pas, c’était dur de suivre !

En effet, ça se passe en Inde. On suit surtout Saboor et Jameel, deux colocataires gays aux personnalités opposées, qui vont peu à peu tomber amoureux et sortir ensemble. L’histoire n’est pas très continue, car souvent interrompue par des flashbacks ou des scènes avec d’autres personnages. Même s’il y a de la continuité temporelle, elle n’est pas immédiate !

On rencontre donc aussi Alamu, leur voisine qui sort en secret avec Noor, une avocate intersexe qui se bat pour sortir une femme lesbienne de prison, et un groupe de militant·es dont la présidente essaie de se faire élire – au parlement je crois, mais je n’ai aucune certitude. Les commentaires étaient d’une aide précieuse pour comprendre ce qui se passait, et l’auteur traduisait aussi quelques mots de vocabulaire, avec une explication. Ça a été écrit alors que l’homosexualité était encore pénalisée en Inde, c’est donc un contexte très différent du mien.

J’accrochais de plus en plus au fur et à mesure que j’entrais dans l’histoire et dans ces personnages. C’est une œuvre que j’aimerais beaucoup relire maintenant que la barrière de la compréhension est abattue. Il y a des scènes très douces et mignonnes entre Saboor et Jameel, tout comme des scènes plus dures dans les flashbacks de leur enfance – en particulier, Jameel vit beaucoup de transphobie et Saboor beaucoup d’homophobie et d’islamophobie.

C’est une bande-dessinée très différente de ce que je lis par ailleurs, mais une fois que je suis rentrée dedans, c’était vraiment magnifique. J’aime particulièrement les scènes chantées ou encore celles sans parole, où toutes les émotions sont portées par le dessin.

 

Durant le challenge, j’ai constaté que beaucoup comptaient leurs points au fur et à mesure, les mettant à jour au fil de leurs publications. Moi, je n’avais aucune idée de où j’en étais… Finalement, j’ai lu 55 livres, avec les bonus des pages et des catégories, je comptabilise 870 points pour les Poufsouffle !

Et quelques discussions avec d’autres lectrices m’ont rappelé que Timbré de Terry Pratchett trainait chez moi depuis 5 ans et que je ne l’ai toujours pas lu alors que j’adore la série et le film…

Avertissements Jilly P : violences policières racistes (mort), validisme

Avertissements Tous les Oiseaux : négligence parentale, mort et deuil

Avertissements Kat : transphobie, anxiété

Avertissements Puu : violences homophobes, transphobes, islamophobies

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Lu pour le Challenge de l’imaginaire

5 réflexions sur « Bilan Challenge des 4 Maisons − Partie 2 »

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