Planète Diversité parlait de Le Prieuré de l’Oranger depuis des mois, et, quand on me dit « fantasy, dragons et couple de femmes », forcément, j’ai envie de lire ! Puis j’ai vu l’épaisseur – 920 pages ! − et je me suis dit « en fait… peut-être plus tard ».
Planète Diversité semble avoir lu dans mes pensées, et, pour motiver tout le monde, a organisé une lecture commune, planifiant une semaine pour chaque partie. Comme je lis vite, j’ai cru que ce serait facile, et j’ai commencé trois jours avant la première deadline… oups ! mine de rien, il y avait 250 pages à lire, et j’étais débordée.
Le début était bien, mais ce n’était pas génialissime. Il y a beaucoup de noms de personnages, de pays, de religions, et même si ce n’est pas prévu qu’on comprenne et retienne, ça me frustrait de ne pas distinguer tous les camps.
La narration alterne entre l’Est et l’Ouest : à l’Ouest, dans un royaume enclavé où les dragons sont sacrés, Tané s’entraine pour les chevaucher. A l’Est où on déteste dragons et wyrds, Ead s’efforce de protéger la reine Sabran, seul rempart contre le retour du Sans-Nom. Cette alternance est très frustrante − surtout qu’on suit aussi l’histoire de Loth et Niclays, respectivement ambassadeur forcé et alchimiste banni – car les histoires respectives avancent lentement. Mais, plus frustrant encore… tout le monde se met systématiquement des bâtons dans les roues. Même les personnages qui ont le même objectif ! Les Inyssiens sont pétris de préjugés et de religion, c’est horripilant.
Durant la partie 2, l’histoire s’améliore : la reine Sabran gagne en complexité et les différentes histoires sont reliées. Les intrigues à la cour se font plus passionnantes, et à partir de la troisième partie, j’ai adoré et je l’ai fini en trois jours – alors que je passais bien 6h sur Don’t Starve !
Lorsque j’ai reposé ma liseuse, c’était sur une note positive, remplie d’une envie de le conseiller à tout le monde car c’était super. Mais je comprends que le début soit rébarbatif − enfin, j’imagine que tout le monde n’a pas galéré autant que moi, sinon le livre n’aurait eu aucun succès.
L’histoire est très complexe, puisqu’elle s’étale sur plusieurs royaumes, religions et personnages. Si l’objectif principal est de vaincre le Sans-Nom, beaucoup de luttes internes font obstacle à cet affrontement final, et complots, combats et alliances sont au rendez-vous !
L’alchimiste Niclays était une bonne surprise : je l’avais trouvé odieux au premier abord, mais on gagne à le connaître, et à la fin, je le considérais avec beaucoup d’affection. Son rôle n’a cependant pas beaucoup de sens – l’histoire aurait presque pu se dérouler sans lui – et surtout, lorsqu’il change, à la fin, j’ai trouvé que ça sortait de nulle part…
En revanche, côté Ouest, j’ai adoré Ead. Elle est attachante et enthousiasmante dès le début, c’est une héroïne pragmatique, intelligente, satisfaisante, prête à faire des compromis. Même si la romance est arrivée par surprise, son histoire m’a plu. C’est elle qui m’a permis d’accrocher au livre.
La reine Sabran est finalement la plus intéressante de tous les personnages. Au début, elle parait capricieuse : elle sait peu de chose, s’énerve contre celleux qui la contredisent, et la religion dont elle est la figure de proue brûle les hérétiques alors que je sentais bien qu’elle était basée sur un mensonge.
Peu à peu, elle va s’affirmer contre celleux qui la manipulent, et gagner en souplesse idéologique. C’est progressif, et très bien fait.
Le jeune ambassadeur Loth suit un parcours similaire, et c’est également un personnage que j’ai beaucoup aimé. Peut-être parce qu’il réfléchit souvent au fait qu’il devrait tomber amoureux, alors que ce n’est pas le cas, et que ses relations avec Ead, Sabran et sa sœur Magret sont géniales. On les ressent ! C’est le genre de personnage dont j’aimerais être l’amie.
Dans cet univers, beaucoup de femmes occupent des positions de pouvoir, et, chose encore plus importante, personne ne conteste leur autorité et capacités sous prétexte qu’elles sont des femmes. On pourrait, au premier abord, se réfugier dans ce monde comme dans un endroit où l’égalité est enfin acquise. Surtout que l’écriture soutient cette ambiance : les descriptions ne ramènent pas les femmes à leur corps. Planète Diversité explique mieux que moi, et plus en détail, en quoi ce livre est un grand pas en avant pour les univers fantasy.
Le livre aborde des problématiques féministes au travers de l’Histoire, et du traitement qui est fait des femmes par une religion en particulier, celle des Sept Vertus. Elle clame qu’alors que la païenne Cléolind devant être sacrifier au Sans-Nom, le chevalier Berethnet a demandé sa main et sa conversion, et en échange, a vaincu le monstre. La religion des Sept Vertus glorifie le Chevalier et considère les concitoyens de Cléolind comme des hérétiques à brûler.
Au contraire, le Prieuré clame que l’action du chevalier était odieuse, que tuer un monstre pour épouser une femme et la convertir, ce n’est pas particulièrement généreux. Il affirme qu’en réalité, le chevalier s’est attribué la victoire de Cléolind contre le Sans-Nom.
Je n’ai pas pu m’empêcher de faire des parallèles avec notre monde, à la fois sur l’aspect religieux – vous connaissez l’histoire de Saint-Georges ? C’est exactement ça − mais aussi sur l’Histoire en général qui tend à attribuer les exploits d’une femme à son époux.
Le Prieuré de l’Oranger met du temps à s’établir, mais ensuite c’est un roman complexe, avec des machinations politiques intéressantes et des personnages prenants. C’est un peu compliqué de dire « tenez bon pendant les 400 premières pages, après, c’est génial ! » Mais c’est ce que j’ai ressenti, et je ne regrette pas de m’être accrochée !
Moi aussi j’ai eu du mal les premières centaines de pages, j’étais perdues entre les personnages et la complexité géographique. Mais finalement j’ai adoré. Le fin m’a un peu déçue par contre car je l’ai trouvé trop rapide par rapport au reste du roman.
Oui, je suis d’accord que la fin était rapide, parce que finalement « tout » se résout dans un combat final… Et pour un roman aussi long, c’est vrai qu’on aurait pu s’attendre à une scène plus complexe !
Mais ça avait été bien amené avant, donc finalement, j’ai surtout été déçue par le revirement de Niclays qui n’était pas très développé, alors que c’est quand même un personnage principal ! Ou alors, c’est moi qui n’ai pas compris ce qui l’amenait à changer…