Quand mon frère a reçu le tome 1 de Percy Jackson pour son anniversaire, je n’avais absolument pas envie de le lire. C’était une édition avec la couverture du film, qui avait l’air ridicule, et les résumés donnaient l’impression d’une histoire clichée pour ados.
Puis ma mère l’a adoré, et a insisté pour que je le lise. « Tu lis vite, ça ne sera pas long, tu peux bien essayer ». Je me suis résignée, et j’ai commencé à lire… je ne me doutais pas que j’étais tombée sur ma série préférée !
11 ans plus tard, il n’y a pas juste les 5 tomes de Percy Jackson : la pentalogie Héros de l’Olympe est parue, et cette épopée s’achève avec Les Travaux d’Apollon, dont le tome 5 est sorti en octobre. Enfin, l’histoire est complète, et j’ai donc décidé de tout relire depuis le début.
Percy Jackson est un jeune garçon « à problèmes » qu’on attribue à sa dyslexie et son ADHD. Cependant, de nombreux ennuis relèvent d’incident mystérieux, et il remarque que son ami Grover semble en savoir plus à ce sujet. Lorsque sa mère est enlevée, Percy découvre que la mythologie grecque est bien réelle et qu’il est un demi-dieu. Accusé d’avoir volé l’éclair de Zeus, il doit le restituer avant le solstice d’été pour empêcher une guerre.
Le scénario tient la route, avec une quête et de multiples péripéties – mon frère et moi avions noté qu’il rencontre une nouvelle créature mythologique à chaque chapitre. L’originalité se situe dans l’univers, et quel univers ! Quand j’étais jeune, j’étais tellement fan de mythologie que je collectionnais les fiches pédagogiques et lisais les pages Wikipédia pour le plaisir. En cours de français, je crayonnais des bandes-dessinées sur les Atrides dans mes marges.
Alors un roman où les mythes sont transposés dans la société moderne ? C’est un rêve devenu réalité ! Non seulement on y retrouve des personnages mythologiques, mais certaines péripéties s’inspirent, par leur scénario, des légendes grecques : on retrouve l’histoire de Persée et de sa mère, l’Odyssée dans le tome 2, et un de mes passages préférés : la transposition du mythe d’Achille et Patrocle dans le tome 5 – hélas, en effaçant totalement l’aspect gay du mythe. Alors que je ne connaissais pas l’existence des fanfictions, j’avais inventé de multiples personnages enfants de diverses déités et leur avais fait vivre des aventures dans ce monde incroyable.
Cet univers m’a moins transportée maintenant que je le connais par cœur, mais la narration dynamique était au rendez-vous pour m’aspirer dans l’histoire. L’humour est là en filigrane, et les descriptions originales correspondent parfaitement au caractère de Percy. C’est un narrateur attachant, et j’avais oublié à quel point il est inventif, astucieux, mais aussi coléreux et épris de justice. Il était bien plus lisse dans ma mémoire, peut-être parce que je n’aime pas trop les personnages impulsifs et qu’ici, ça ne m’a pas dérangée : sa colère est justifiée et au contraire, ça lui donne de la complexité. Les phrases sont pleines de complicité et de dynamisme, et on est toujours dans la tête de Percy, ressentant ses émotions avec lui.
J’ai été un peu déçue par ma relecture des deux premiers tomes, certes excellents, mais pas aussi passionnants que dans mon souvenir. Le tome 1 était autrefois mon préféré, et je trouvais que la qualité diminuait au fil des tomes… mais maintenant, c’est définitivement le tome 3 que j’aime le plus, et je placerais également le tome 5 au-dessus du premier. A mon avis, c’est parce qu’avant, l’univers jouait pour beaucoup dans mon amour de cette série, et c’est dans le tome 1 qu’on le découvre. Maintenant que je suis familiarisée à ce monde, je suis plus sensible au scénario et aux émotions que me procurent les personnages… et les tomes 3 et 5 sont ceux qui m’ont fait monter les larmes aux yeux.
Le tome 3 est un cependant un bon exemple de ce qui me dérange à la relecture. Je l’ai adoré parce qu’il introduit une atmosphère plus sombre, des sujets plus difficiles, des personnages que j’adore et des héroïnes stylées, mais le message de tolérance qu’il veut transmettre est maladroit.
Rick Riordan est quelqu’un qui a l’air de se préoccuper très sincèrement de la représentation : s’il a écrit Percy Jackson, c’est pour que son fils dyslexique et hyperactif puisse se reconnaitre dans des personnages. Son discours pour le Stonewall Award m’a beaucoup touchée ! De façon générale, c’est un auteur qui semble écouter son public et s’améliorer au fur et à mesure, reconnaissant ses erreurs et progressant dans ses ouvrages suivants. Par exemple, alors que dans Percy Jackson Grover faisait semblant d’être handicapé pour cacher sa nature de satyre, dans la série suivante, le satyre Gleeson n’utilise pas du tout ce cliché néfaste.
Alors forcément, le début est bancal. Il y a beaucoup de rhétorique psychophobe, validiste ou grossophobe, et même pour les oppressions que Rick Riordan condamne, c’est maladroit. Le tome 3 essaie de dénoncer le sexisme, mais j’ai trouvé le message insatisfaisant. C’est le seul livre avec une majorité d’héroïnes, et l’arc de Percy consiste à apprendre à les respecter davantage. En effet, on nous présente les chasseresses d’Artémis, un groupe de filles ayant juré de fuir la compagnie des hommes. Et la manière dont elles sont décrites, du point de vue de Percy… on voit Apollon qui les harcèle, mais la conclusion de Percy lorsqu’elles s’écartent de lui c’est qu’elles sont haineuses et hautaines. Quand Bianca, qu’il a sauvée, les rejoint, il considère qu’il a perdu son temps en la sauvant. C’est elle qui s’excusera auprès de lui par la suite…
Et certes, on nous montre des chasseresses badass, avec des personnalités différentes et complexes, on voit la manière dont les héros s’approprient les exploits des femmes et les laissent tomber. Percy apprend à les apprécier… mais l’auteur a, à mon goût, trop voulu transmettre un message « universel » : les chasseresses aussi apprendront que « pas tous les hommes » (sic !) sont à rejeter. Eh oui, on a droit à un Not All Men !
J’espère vraiment que la série Disney+ saura corriger ces défauts ! Et au passage, qu’on aura un peu plus de personnages racisés, parce que là ils meurent tous.
Percy Jackson porte un message de tolérance à travers sa discussion de la place des monstres et de la place des enfants de déités mineures. À ce sujet, j’avais des doutes avant de relire : l’histoire s’était simplifiée dans mes souvenirs, et je m’étais dit que franchement, si Percy avait écouté les méchant·es dès le début et aidé à accorder une place aux sang-mêlé·es mineur·es, il n’y aurait pas eu besoin de guerre… en effet, la plupart des méchant·es se révoltent en raison de l’injustice des déités grecques, qui les punissent pour des fautes qu’iels n’ont pas commises ou les excluent en raison de leur parenté. Les telchines ont été enfermées injustement, les enfants de déités mineures n’ont pas le droit à une réelle place au camp, et beaucoup de déités abandonnent leurs enfants.
En fait, la série tourne autour de ce message. Les premières confrontations entre Percy et ses ennemis mettent en valeur la cruauté de ceux-ci, et Percy n’a pas envie d’écouter quelqu’un qui cherche à le tuer ! Mais au fil des tomes, les exemples d’injustices s’accumulent et la position de Percy bouge, tout comme celle des lecteurices. C’est vraiment bien fait ! La morale est bonne et ça rend les méchant·es complexes.
De façon générale, c’est une mauvaise idée de montrer les personnes opprimées comme des méchantes, mais ici on nous montre bien que c’est de la responsabilité des déités et non des personnes qui se dressent en face d’elles.
Il y a toutefois des exceptions à ce message, et c’est là que ça devient un peu plus bancal. Il n’y a pas que des sang-mêlé·es dans cette histoire : il y a aussi des monstres, qui se caractérisent par le fait d’avoir une âme différente, immortelle. Le meilleur ami de Percy est un satyre, qui se réincarnent en plantes à leur mort, son demi-frère est un cyclope, qui se désintègrent en poussière comme beaucoup de monstres et se réincarnent plus tard. Le directeur de la colonie est un centaure, Percy a un chien des enfers apprivoisé… on a de nombreux exemples de monstres dans le « camp des gentils ». Tout le message du tome 2, qui s’intéresse de près au cyclope Tyson, est qu’il faut lui accorder une place dans le camp !
L’idéal serait donc que dans le dernier tome, on voie Percy affronter montres et humain·es de la même manière. Qu’il refuse de les tuer, ou qu’il accepte que ce sont ses ennemi·es et les élimine au combat, ça devrait être pareil peu importe l’espèce ! Mais ce n’est pas le cas.
Dans le tome 4, on voit de jeunes monstres suivre un cours de propagande, révoltés par la punition injuste à laquelle les dieux les ont condamnés du fait de leur nature. Percy les tue sans y réfléchir. Au cours du tome 5, à plusieurs reprises, Percy hésite à tuer les monstres justement parce qu’il pense à Tyson ou Kitty O’Leary. Mais malgré toute son hésitation, il le fait.
En revanche, tout au long du récit, Percy épargnera des sang-mêlés qui l’ont trahi à plusieurs reprises et qui cherchent à les tuer.
Du coup, le message de tolérance ne passe qu’à moitié. Oui, on a passé tout un tome à apprendre que les monstres avaient une personnalité et devaient être traités comme des humains, mais derrière ils sont dépeints comme de la chair à canon. Je sais que beaucoup de livres d’action préfèrent ne pas s’appesantir sur le sort des sbires, justement parce qu’on veut des combats épiques sans trop d’hésitation morale, mais ici, c’est en directe contradiction avec le thème de l’histoire. Pop Culture Detective avait fait une excellente vidéo sur un sujet similaire en parlant des Stormtrooper de Star Wars.
Cependant, avec sa narration à la première personne, cette série fait la part belle aux émotions et aux relations de Percy avec les autres personnages. Même s’il y a des incohérences, les sentiments qui ressortent le plus, c’est l’attachement qu’on éprouve pour de nombreux monstres, comme Kitty O’Leary, Tyson ou Grover, et le message d’humanité à appliquer reste intact.
Beaucoup d’affection transparait dans les interactions de Percy. J’avais toujours l’impression d’être proche des personnages, je ressentais leurs amitiés, leurs liens familiaux, la romance, l’admiration… j’y étais ! C’est sans doute pour ça que je me suis autant imaginé vivre des aventures à leurs côtés.
Cet article est dur à écrire car si je me laissais aller, je pourrais rédiger des pages et des pages sur chaque tome. Même si maintenant, l’écriture et les péripéties me charment un peu moins, et je vois les faiblesses dans le message, ça reste ma série favorite. L’univers de Percy Jackson me fascine, j’ai imaginé tant d’aventures à l’intérieur ! Je suis si proche des personnages que j’ai l’impression qu’il s’agit de mes ami·es, on ressent toutes leurs relations et toute l’émotion qui s’en dégage. J’ai hâte de lire Héros de l’Olympe pour les retrouver !
Avertissements : violence, mort, validisme, psychophobie, grossophobie, sexisme, cruauté envers des animaux
Ma professeure de français nous à demander de lire ce livre. ( Je n’aimait pas la mythologie )
Mais ce livre m’a fait changer d’avis….
C’est génial qu’une prof de Français conseille ce genre de romans !
Oui nous travaillons aussi sur hercule en ce moment.